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Fin des transactions marchandes

Article bizarre (essai de prose simplifiée et autobiographique ?)

Cet après-midi, j'étais partie à la bibliothèque à la recherche d'oeuvres niaises mais néanmoins mouvementées, qui pourraient exciter mon imagination et occuper l'esprit malade que j'étais depuis trop longtemps. Depuis des semaines on m'entend dans la maison tousser de façon inquiétante et cruelle, ma mère se demande si ce ne sont pas là les symptômes de la tuberculose qui se rapprocherait dangereusement, car ce n'est pas la première fois que ma constitution faible fait des ravages. La maison ressemble, dans ces moments de vacances et de maladie, à un cimetière : elle est hantée sans cesse par la menace d'une mort potentielle et imminente, plutôt fantasmée et peut-être l'image est-elle ridicule, mais néanmoins vraiment présente dans l'esprit. Je devrais voir un docteur, mais au diable le docteur ! Que me dirait-il que je ne soupçonne déjà vaguement ? J'ai sans aucun doute les mêmes symptômes de la tuberculose, je tousse et je crache du sang, certes, mais je souhaite conserver la certitude qu'il ne s'agit là que d'une maladie chronique et d'époque, comme les femmes poitrinaires au XIXème siècle. Je n'avais plus aucun plaisir, comme autrefois quand j'étais petite, à traverser une rue vide et glaciale, plus aucun plaisir non plus à sentir le vent (de la lande ?) irriter ma gorge. Mes violentes quintes de toux provoquaient la curiosité de quelques rares passants. L'atmosphère feutrée et douce de la bibliothèque, sa luminosité familière ne pouvaient qu'adoucir mon état maladif. Je cherchais un livre suivant ces critères : doux mais pas sans intensité, l'intrigue facile à suivre, pas tordu, pas simpliste, mystérieux et actif. Il me fallait des histoires de la lande, du vent, de la pluie, de grandes familles artistocratiques, des personnages expressifs et conditionnés par le climat, des personnages inquiétants et orageux pouvant être reproduits sur une toile (à la Edvard Munch ?). Il y a quelques temps j'avais laissé tomber Women in love de Lawrence car tout cela me semblait trop esthétique, mystique et figé. J'évoluais entre les rayons, en m'appliquant à éviter mes probables connaissances car je ne voulais engager aucune discussion : je n'aime pas qu'on me voie lorsque je suis malade. D'ailleurs je ne suis plus sociable : depuis trois mois je n'ai parlé qu'à cinq personnes, et pour dire peu en vérité. J'ai donc pris : Les Hauts de Hurle-vent, (Emily Brontë), La danseuse du gai-moulin (de Simenon), Les Forestiers (de Thomas Hardy), et Les contes cruels (de Villiers de l'Isle-Adam). J'ai passé l'après-midi à sentir venir le vent que ramenait Heathcliff, ce bohémien, et à me féliciter de ce que mon état d'esprit coïncidait avec ce que ressentait le narrateur. Ma lecture, de temps en temps, était interrompue par ma toux, la bête indisciplinée, qui surgissait à la manière d'un fauve non domestiqué. Ce soir, je ne dormirai pas.

Oblivion le 08.02.06 à 01:21 dans Augenblick
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Commentaires

Toutes mes excuses, je ne ferai sans doute pas un commentaire aussi inspiré que ceux à ton précédent article (qui étaient fort intéressant, quoiqu'il en soit), mais j'ai juste envie de déposer un ou deux petits mots ici : en fait, il m'arrive de plus en plus souvent de lire tes articles avec régal. (qui ça? Rheum, rheum)
Ton cynisme plein d'humour se fait plus doux que sur ton ancien blog, et je dois dire que ça n'est pas déplaisant, mais toujours aussi... euh, croustillant est-il le bon terme?
Bref, je cesse là mes élucubrations!

Feu - 08.02.06 à 14:14 - # - Répondre -

Quel style...

Je te lis avec toujours autant de plaisir, c'est un régal à chaque fois, vraiment.

Merci.

Matriochka - 08.02.06 à 21:09 - # - Répondre -

ça fait plaisir :)

Merci à toutes les deux

Oblivion - 09.02.06 à 11:52 - # - Répondre -

C'est drole comme les commentaires usent de métaphores digestives.

Ton texte des délicieux comme d'habitude. Miam. Compliments au chef.

Platonistyle - 09.02.06 à 18:02 - # - Répondre -


Platonistyle, ton profil est vraiment dingue. Bordel la tête de ma mère, la terre abrite pas plus fou que toi. En plus paraît-il tu l'as pas fait exprès, mais tu n'as pas fait exprès quoi ? Tu n'as pas fait exprès de devenir fou, ou tu n'as pas fait exprès de faire un profil dingue ?

Anonyme - 10.02.06 à 13:21 - # - Répondre -

Je n'ai pas fait expres de venir sur ce blog. Je n'ai pas fait expres de lire tes articles. Je n'ai pas fait expres d'y répondre. Je n'ai pas fait expres d'avoir mis mon nom, mon adresse email et m mot de passe quelque part. Je n'ai pas fait expres d'aller sur le site des chants de maldoror. Je n'ai pas fait expres de lire de chant IV, chapitre 4. Je n'ai pas fait expres de faire "copier". Je n'ai pas fait expres de faire "coller. Je n'ai pas fait expres de faire "ok". C'est pas ma faute a moi.

Déterminisme, tout est déterminisme...

Platonistyle - 10.02.06 à 13:27 - # - Répondre -

Re:

Aide-toi, et Dieu t'aidera...

Oblivion - 10.02.06 à 13:33 - # - Répondre -

Dieu!? Aurais tu déja oublié la raison pour la quelle ma colonne vertébrale est un glaive?Moi-même, je ne me le rappelle pas très clairement ; cependant, si je me décide à prendre pour un souvenir ce qui n’est peut-être qu’un rêve, sachez que l’homme, quand il a su que j’avais fait vœu de vivre avec la maladie et l’immobilité jusqu’à ce que j’eusse vaincu le Créateur, marcha, derrière moi, sur la pointe des pieds, mais, non pas si doucement, que je ne l’entendisse. Je ne perçus plus rien, pendant un instant qui ne fut pas long. Ce poignard aigu s’enfonça, jusquau manche, entre les deux épaules du taureau des fêtes, et mon ossature frissonna, comme un tremblement de terre!

Platonistyle - 10.02.06 à 15:00 - # - Répondre -

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